Un jour, un enfant est diagnostiqué dys-quelque chose. Dyslexique, dyspraxique, dysphasique, dyscalculique… Un mot posé en un éclair de temps qui change énormément de choses pour toujours. Pour l’enfant, mais aussi pour ses parents. Parents d’enfant Dys, on parle de vous.
La vie commence sans dys
L’enfant naît. C’est le plus beau du monde. Petit à petit, il grandit, et il est le plus merveilleux de l’univers.
Un jour, quelque chose d’anodin se produit.
Maman ou papa remarque qu’il y a un petit truc qui ne marche pas très bien. Ca peut être sur la prononciation des mots, sur la façon de se lâcher pour marcher, sur cette manière étrange de tenir un feutre…
Ce n’est rien, ce n’est qu’un petit truc.
Le temps passe, la maternelle passe, et l’entrée en primaire offre un coup de projecteur plus violent, en plein dans les yeux.
Le savaient-ils, ces parents, que ce petit truc était révélateur d’un autre truc plus grave ? Savaient-ils, au fond d’eux-même, que leur enfant avait un problème, un vrai ?
Peut-être qu’ils s’en doutaient, sans doute qu’ils le redoutaient.
Et puis, par un chemin ou un autre, ils sont allés consulter. Médecin, psychologue, orthophoniste, psychomotricien… et puis le diagnostic est tombé : leur enfant est dys-quelque chose. Et ce « dys-truc » change tout, parce que ce n’est pas une maladie, pas un truc qui passe ou qui se soigne.
Non : c’est un handicap, et il peut être très lourd.
Des dys-parents ?
Ces parents doivent alors comprendre un maximum de choses en un minimum de temps. C’est beaucoup leur demander. D’abord, ils doivent comprendre ce qui touche leur enfant. Si l’information est plutôt foisonnante autour de la dyslexie, ça se complique pour les autres troubles dys.
La dyspraxie ? « Trouble de la planification et de l’exécution des gestes » : ok, ça veut dire quoi, concrètement ?
La dysphasie ? « Trouble structurel, primaire et durable de l’apprentissage et du développement du langage oral » : merci, c’est à dire ?
ect…
Et, au delà de la compréhension pure de ce qu’il se passe, les parents doivent faire plus : ils doivent faire le deuil de leur enfant tel qu’ils l’imaginaient.
Dys : 3 lettres qui vont tout changer
Ils doivent intégrer le fait que leur enfant est atteint d’un handicap, c’est à dire réviser eux-même la perception qu’ils ont de ce mot. Le sortir de son image d’Epinal qui le représente avec un fauteuil roulant ou une canne blanche.
Ils ne sont plus seulement les parents d’un enfant, ils sont les parents d’un enfant dys.
Pas seulement, mais ça fait quand même trois lettres de plus qui vont changer tout le quotidien.
En fonction de l’intensité des troubles, ça veut dire qu’il va falloir s’organiser pour l’aider au mieux.
Trouver les professionnels qui pourront assurer les séances de rééducation. Trouver le temps de l’y conduire.
Trouver les sous pour payer intégralement les nombreuses rééducations non remboursées par l’assurance maladie.
Ca veut dire consulter dans tous les sens, et monter un dossier pour la MDPH (maison départemental des handicapés).
Ca veut dire trainer longtemps pour le faire… : « Mon enfant, handicapé ? »
Oui, on me l’a dit.
Non, je ne l’accepte pas.
Alors faire le dossier de reconnaissance, vous pensez bien que ce n’est pas aisé…
Et puis ça se voit même pas !
En plus de ça, de tout ça, il va falloir expliquer ce truc qu’on ne comprend pas ou, dans le meilleur des cas, qu’on comprend mal.
Les troubles dys sont des handicaps invisibles. Quand les parents l’apprennent, la « logique » veut qu’ils se tournent vers leur entourage.
Un besoin de réconfort, de compréhension, qui se heurte souvent à un mur appelé « déni ».
Puisque le handicap ne se voit pas, il n’est pas grave, il n’existe pas. « Tu t’inquiètes pour rien. Mais non, il n’est pas dys-truc. »
La solitude des parents d’enfant dys est aussi tricotée par cette absence de reconnaissance de leur entourage.
Comment leur faire comprendre que, dans le cas de troubles lourds, toute la vie change ?
Que tout le quotidien des parents (de maman, souvent, qui fait le trait d’union entre tous les dispositifs à mettre en place et à pérenniser) est modifié ?
Que ces parents ont encore plus peur pour leur enfant, pour sa scolarité, pour son intégration dans la vie, pour son avenir ?
Que chaque rentrée scolaire est une épreuve, qui se passe plus ou moins facilement selon la capacité de compréhension de l’instituteur. Et on ne parle même pas du collège…
Comment leur faire comprendre ce que les parents d’enfant dys ont eux même tant de mal à intégrer tant ils sont émotionnellement impliqués ?
Chers parents d’enfant dys…
Je parle des parents d’enfants dys, mais au lieu de dire « eux », je devrais dire « nous ».
Aurai-je été capable de parler d’eux comme ça si je n’avais pas été l’une d’entre eux ?
Même si je peux faire preuve de curiosité et d’empathie, la réponse est : probablement pas.
Je n’ai ouvert mes écoutilles à 100 % que quand j’ai été moi-même confrontée au diagnostic de dyspraxie d’une de mes filles.
Des esprits tordus me diront peut être qu’il y a des handicaps plus lourds, plus graves : c’est vrai. Mais on ne se console pas avec le malheur des autres.
On peut également penser que certains troubles dys sont plus faciles à gérer que d’autres : c’est peut-être vrai.
Moi je n’ai été présentée qu’à la dyspraxie et, pour ce que j’en sais, c’est tout sauf une franche partie de rigolade.
Voilà, chers parents d’enfant dys et tous les autres, j’espère que cette lettre beaucoup trop longue vous sera utile ou vous permettra de comprendre un peu mieux tout ce qu’il y a derrière ce « D », ce « Y » et ce « S ».
Soutenez-vous, soutenons-nous, c’est pas facile tous les jours, mais nos fantastiques enfants le valent bien…