Non-non, je ne te parle pas de Dora et sa coupe rigide comme une loi nord-coréenne. Ni de l’autre bagnole de Cars, ni de… bref, tu vois l’idée. Je te parle des héros, des vrais, de ceux qui marquent une vie entière pour des raisons qui n’appartiennent qu’à nous, qu’à toi. Et si ce héros, c’était…
Quand le soir tombe comme au meilleur de la plus longue journée islandaise (à 16 h 58, donc), nuit d’hiver si longue et noire, où les pensées se tournent comme des pouces de flemmards, il arrive, sur un malentendu, que de grandes questions viennent à se poser dans le cerveau d’une mère.
Parmi elles : comment je m’habille demain ? Pourquoi le lave-linge fait semblant d’être mort ? On enterre Mandela, qui seront les héros intouchables de mes enfants ? C’est une bonne idée ou pas le sfumato en maquillage ? Est-ce que ce livre de Colombe Schneck* va me hanter encore longtemps ? Des petites et des grandes questions, donc, qui fleurissent dans ta tête. Et, si pour certaines tu as déjà une vague idée de la fleur qu’elle vont donner (celle du lave-linge pue, par exemple), d’autres ont des pétales invisibles, inconnus…
Combien de pétales, combien d’ailes, pour ceux qui seront les héros de nos enfants ?
Figure-toi que j’ai découvert l’existence de Nelson Mandela quand je suis tombée amoureuse de Johnny Clegg. C’était au siècle dernier. Trop beau, trop bouclé, trop tout ! Alors, comme je ne comprenais pas les paroles de sa chanson Asimbonanga, j’ai chouravé le dictionnaire d’anglais (l’action se situe au siècle dernier, je te dis, internet n’existait pas !) de mon père pour me faire ma petite traduction maison. Et voilà, j’ai découvert un héros. Sans capes et sans ailes, moins poilu que mon Kiki que j’aimais de tout mon coeur, mais plus… enfin, tu vois, plus tout, quoi.
(Là, tu te demandes pourquoi c’est Wonder Woman qui illustre ce merveilleux article…)
Des héros, j’en ai eu d’autres. Comme Wonder Woman, par exemple. Mais j’y reviendrai plus loin. Parce que la vraie question, à l’heure où le héros du XXe siècle s’est éteint, c’est de savoir qui sera le Mandela de demain ? Pas pour nous, pas pour toi, mais pour ton ou tes enfants ? Quelqu’un qui défendra les mêmes causes, parce qu’elles sont encore tellement loin d’être gagnées ?
… Ou alors ce sera Nabilla ?
Allez, bon, ça va, on ne va pas se dire maintenant que les époques ont les héros qu’elles méritent, on verra ça pour quand on sera vieilles et vieux.
N’empêche que, aujourd’hui, je ne sais pas qui sera le héros, le vrai, de tes enfants et des miens. Peut-être qu’on ne le connait pas. Peut-être que c’est ton enfant ! Ou l’une de mes filles ? Ou, s’ils se marient, les deux ensembles (n’y compte pas trop si tu as un garçon, ma Moitié envisage de faire passer des castings absolument terrifiants.) ?!
Le héros de demain, c’est…
Repense à qui est devenu ton héros à toi, et pourquoi. Le héros de demain, c’est celui qui sera capable de lui faire comprendre que le respect des autres n’est pas un vain mot, qu’on a le droit de tomber, de se tromper, d’avoir zéro en maths (attention, pas tout le temps)… C’est celui qui lui montrera que, tel qu’il est, il n’est ni rien, ni personne d’insignifiant, mais qu’il n’est pas non plus le maître du monde. C’est celui qui saura lui montrer que le chemin, là, il peut le prendre, mais que cet autre n’est peut-être pas une bonne idée.
Le héros de demain sera juste, aimant, respectueux, courageux, fragile, et beau comme tous les héros.
Je vais te dire : le héros de demain a du pain sur la planche !
Alors ton enfant en aura peut-être plusieurs, pour des raisons différentes, mais peut-être que son héros de demain, ce sera toi. Après, tu déclines : si tu es une femme (comme la majeure et belle partie du lectorat des Drôles de Mums), remplace le mot « héros » par « héroïne » partout où ça t’arrange dans cette chronique.
Personnellement, je suis égoïste : que ce soit pour une infime partie ou juste un tout petit peu, j’espère que je ferai partie des héros de mes enfants.
On en reparle dans 10 ou 20 ans ?
* La réparation, Colombe Schneck, Grasset.