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Happy Mama/Mère Heureuse ou mère « normale » ?

Es-tu Happy Mama ou Mère dans la Vraie Vie ? Passes-tu du « Temps Qualité » avec ton enfant ? Oui ? Non ?! Ouh là là, tu es mal barrée mon amie. Ou pas ? Pour en avoir le coeur net, faisons le tour de la question.

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L’expression semble tout droit sortie d’un référentiel de l’Afnor. « Tiens je vais passer du temps qualité avec mon produit bébé. »Le « quality time » est un truc très 2015 qui est une extension du « phénomène » Happy Mama. Un peu comme une appli greffée sur les mères ultra connectées.

Décryptons, analysons, regardons ça de plus près, entre deux couches à changer et de vernis à ongles.

Happy Mama, c’est quoi ?

C’est une tendance qui se répand comme une crinière ondulante sur le net, via les réseaux sociaux et les blogs : des photos et des statuts à la pelle revendiquant le bonheur absolu d’être mère ET femme impeccablement brushée et manucurée. Trop mère, trop belle, trop happy, quoi.

Happy Mama, ce sont donc des belles photos avec des filtres pour gommer les éventuels défauts.

Exemple avec Jess Dempsey, blogueuse mode australienne, qui poste des photos d’elle et accessoirement de ses enfants en bandoulière :

happymama

Jess, mais aussi des centaines d’autres, de préférence sylphides, tentatives de clones de Natalia Vodianova, top model et fluette mère de 3 enfants qui a l’air d’avoir 16 ans, inondent le net de leur bonheur familial et de tous ces merveilleux moments passés avec leurs adorables enfants.

Donc le Quality Time ou Temps Qualité avec les enfants, quoi qu’est-ce donc ?

C’est une tendance qui démontre aux mères (pardon, aux « mamans ») qu’il faut qu’elles passent des super moments avec leurs enfants.

Oh, merci pour cette découverte, c’est vrai qu’avant 2015, on n’y avait pas pensé, dites donc !

A ceci près que le Temps Qualité doit être photographié et partagé, pour prouver qu’on a bien passé du temps de jeu vraiment exceptionnel avec son enfant… mais que d’une main, l’autre étant monopolisée par le smartphone.

(La Happy Mama doit être mono-main, c’est contractuel. Sinon, ça ne marche pas.)

Le dire à TOUT le monde

Dieux des mamans, merci, grâce au phénomène #happymama, on peut enfin apprendre des choses sur comment être une mère super heureuse et en profiter pour le dire à tout le monde.

Mais d’où diable vient ce besoin de partager absolument tous les moments heureux sur les réseaux sociaux ? Les moments intimes, familiaux, c’est donc interdit de les vivre entre soi ? Etrange, cette impérieuse nécessité de montrer à quel point maman est heureuse avec ses enfants.

Est-ce que ça revient à dire « regarde, toi la pauvre mère fripée, là, devant ton écran, comme je suis suprêmement heureuse et vachement plus que toi, grosse gourde. » ?

Entre vision idéalisée de la maternité, miroir aux alouettes ou encouragements à revendiquer sa féminité sous toutes ses formes, on ne sait quel fil tirer dans ce phénomène Happy Mama.

Contre-attaque des « femmes dans la vraie vie » / womenirl en english

Mais certaines ont déjà fait le choix de le démonter en postant des photos de leur vie réelle de mère (irl = in real life = dans la vraie vie) sur le compte instagram #womenirl, dont voici un exemple :

womenirl

Des situations du quotidien, des enfants qui font des expériences scientifiques qui consistent à jeter des téléphones dans les toilettes, inonder la cuisine, jeter des tas de trucs dans des tas d’endroits… la vie réelle, c’est vrai.

Celle de tous les parents, de toutes les mères.

Qui peuvent se faire belles comme Jess ou les autres, mais qui ne sont pas dispensées pour autant de ramasser le bazar et de changer des couches mortelles.

Qui peuvent porter des talons hauts et passer l’aspirateur  (mais pas en même temps).

Qui ne sont pas figées dans leurs moments de joie ou de crise avec leur(s) enfant(s).

Qui passent de l’un à l’autre.

Normal, quoi…

Ni Happy Mama, ni Women IRL. Les 2, en fait.

Les unes et les autres se donnent une réponse à l’image par l’image, dans une guerre des apparences. Et apparence ne rime pas avec nuance.

Derrière, il y a l’ombre de l’éternelle opposition entre « mère parfaite » et « mauvaise mère », qui exclut qu’on puisse être les deux.

Est-ce qu’un jour on va comprendre que la plupart d’entre-nous sommes un peu plus malignes que ça ?

Photo de Susan Copich

 

 

 

A propos de Béatrice Knoepfler

Journaliste, auteur d'un livre de grossesse et co-auteur de deux filles tout à fait géniales, Béatrice Knoepfler est également femme de ménage (chez elle), cuisinière, lavandière, joggeuse à la petite semaine, férue de littérature et de tissus liberty et nulle en crochet. Une vraie femme moderne, comme toi ! C'est d'ailleurs pour au moins une de ces bonnes raisons que c'est ta copine et notre super rédac'chef.